L’exposition de peintures de Jiří Načeradský provenant de collections privées slovaques est un rappel significatif de la place que l’œuvre de cette légende de la peinture tchèque de la seconde moitié du XXe siècle et du début du nouveau millénaire a gagné auprès des amateurs et des connaisseurs d’art et en Slovaquie.

L’Institut français peut, à première vue, sembler être un organisateur surprenant pour une exposition d’un peintre tchèque en Slovaquie. Il faut pourtant se souvenir qu’après l’arrivée des troupes du Pacte de Varsovie, à Prague, en août 1968, la France a été le pays même dans lequel Načeradský et ses collègues artistes Rudolf Nemec et Jiří Sopek ont cherché l’asile.

Načeradský y passe au total 16 mois, dans les villes de Caen et de Paris. C’est là qu’il a rencontré la femme de sa vie, qu’il a épousée le premier jour après son retour dans sa patrie. Lorsqu’il réussit à obtenir une bourse d’études de trois mois à Paris en 1970, il part et tente de faire venir sa femme et sa fille Klara, qui vient de naître. Cependant, comme le régime ne l’y autorise pas, il est rentré chez lui au bout de trois mois et n’a pu se rendre à nouveau en France qu’après la révolution de velours en 1989. Depuis lors, il se rend en France chaque année, et même sa fille Klara, qui, alors qu’elle venait de naître, s’était vu refuser l’accès à son pays bien-aimé par les autorités de l’époque, s’y est rendue.

La Tchécoslovaquie a réprimé le talentueux Načeradský en le boycottant des lieux officiels à son retour de France en 1970. Il était l’une des stars artistiques des années 1960 libres, si bien qu’il lui fut interdit d’exposer publiquement pendant la Normalisation et qu’il dut gagner sa vie comme restaurateur.

La France, en revanche, l’a soutenu même pendant cette période – en achetant sept de ses dessins pour les collections de la prestigieuse galerie d’art moderne, le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou. Načeradský a également été mis à l’honneur à deux reprises lors de l’exposition de ses œuvres par le CGP.

Načeradský aimait beaucoup la Slovaquie et notamment à travers les relations personnelles qu’il a noué parallèlement à son service militaire basé à Liptovský Mikuláš en 1965 (en particulier la naissance de son amitié avec le sculpteur Jozef Jankovič) et aussi durant son voyage dans les ateliers d’artistes slovaques non officiels, qu’il a entrepris pendant la ferme période de normalisation en 1980.

Le deuxième chapitre des liens de l’artiste avec la Slovaquie s’ouvre avec ses expositions personnelles en Slovaquie. La première a eu lieu en 1991 à l’initiative du galeriste Miloš Kleibl à Bratislava, et avec le temps, le célèbre publiciste et collectionneur d’art Ivan Melicherčík a lancé une série de sept expositions dans différentes galeries à travers la Slovaquie. Les trois dernières expositions ont eu lieu après la mort de l’artiste, ce qui témoigne d’autant plus du fort attachement à la personnalité et à l’œuvre de ce peintre de la part de Melicherčík ainsi que du public slovaque.

L’exposition actuelle, la neuvième en Slovaquie, est née à l’initiative de Jakub Prokeš, publiciste, responsable des médias et vulgarisateur artistique, qui reprend ainsi cet honorable flambeau de ses prédécesseurs. L’exposition Načeradský à Bratislava, sous-titrée Femmes – Vénus – Mantes, se déroule au centre de la capitale de la Slovaquie, en plein cœur de la ville, sur la Grand-Place, dans la galerie de l’Institut culturel français. Cette exposition, préparée depuis deux ans, présente plusieurs points d’intérêt. Elle présentera exclusivement des œuvres provenant de collections privées slovaques et la plupart d’entre elles seront exposées pour la première fois non seulement en Slovaquie, mais aussi depuis l’époque tchèco-slovaque. Le point central de l’exposition est sûrement la plus grande collection complète de dessins de Načeradský des années 1960, sa période la plus prisée. Elle sera complétée par plusieurs huiles sur toile majeures de l’artiste datant de 2009 à 2012, dont la plus petite mesure un mètre de long et la plus grande plus de deux mètres. Plus de 50 œuvres ont été sélectionnées pour l’exposition. Parmi elles, par exemple, les huiles sur toile emblématiques que sont Mante mélancolique et Meunières amoureuses de 2009, qui seront présentées en Slovaquie pour la première fois. Les amateurs d’art et les connaisseurs auront l’occasion de voir un certain nombre de premières de l’exposition des années 1960, comme les dessins Enfants d’Apell, Maîtresse d’architecte et Baron rouge, et après un certain temps, ils pourront également admirer à nouveau le célèbre dessin d’un mètre de Načeradský, Kandinsky.     

L’exposition Načeradský à Bratislava est organisée grâce au soutien de quinze collectionneurs privés et au patronage des ambassadeurs de France et de la République tchèque en Slovaquie. Sa motivation, son concept et son ampleur suscitent déjà de grandes attentes en Slovaquie, comme en République tchèque, et elle remplit déjà toutes les conditions pour devenir l’un des temps forts de la saison culturelle de 2023.     

Petr Mach, commissaire de l’exposition

Jakub Prokeš – Exposition Jíři Načeradský à Bratislava

Načeradský en Slovaquie

1991 Jiří Načeradský, Galerie Kleibl, Bratislava

2012 Le cinquième élément Načeradský. Collection d’Ivan Melicherčík, Église Klarisky, Bratislava.

2013 Jiří Načeradský dans la collection d’Ivan Melicherčík, Galerie Orava, Dolný Kubín.

2013 Jiří Načeradský dans la collection d’Ivan Melicherčík, galerie d’art Považská à Žilina, Žilina.

2013 Dessins, Galerie Roman Fečik, Bratislava

2014 Jiří Načeradský. Collection Ivan Melicherčík, Musée d’art Danubiana Meulensteen, Čunovo.

2015 REBEL – Jiří Načeradský dans la collection Ivan Melicherčík, Galerie Tatra, Poprad.

2017 – 2018 Jiří Načeradský : OBRY – OBRAZY, Centre culturel municipal, Galerie Fontána, Piešt’any.

2023 Načeradský à Bratislava. Femmes – Vénus – Mantes, Œuvres des collections privées slovaques,

Galerie de l’Institut français de Slovaquie, Bratislava